Nicola Giuliani est un reporter américain. Nous sommes à Mexico, en août 1940 et il rêve de rencontrer Trotski afin de l'interviewer. Malheureusement, le célèbre homme politique russe est assassiné avant que Giuliani ait pu le rencontrer. Il fait alors la connaissance d'un vieux biologiste russe, Poliakov, qui lui laisse entrevoir la possibilité de s'entretenir avec Trotski...
Le mausolée de chair est une nouvelle prometteuse et frustrante à la fois. Prometteuse parce que le sujet en est fascinant : on flirte entre science-fiction et fantastique et l'histoire prend pour point de départ un événement historique intéressant. Frustrante parce qu'en seulement soixante pages, l'auteur nous laisse forcément sur notre faim. Je trouve que l'histoire avait la densité d'un roman : j'aurais aimé que le contexte historique soit plus amplement explicité ; il y a là, il me semble, tout un arrière-plan idéologique qui aurait pu être exploité. Mais alors, le pire, je crois que c'est la fin. On a trop envie d'en savoir plus et pourtant la dernière page arrive, argh ! Dommage donc, parce que le récit est bien construit, bien ficelé et nous tient en haleine. On sent que l'auteur a pris soin de se documenter sur son sujet, et de puiser dans des références culturelles variées et maîtrisées. En tout cas, il a le mérite de nous donner envie d'en savoir un peu plus sur le parcours de Trotski.
Le journaliste exprima sa perlexité.
"Vous me disiez juste à l'instant qu'il allait mourir...
-Ceux qui vivent aujourd'hui, une autre fois vivront, une autre fois seront."
Giuliani écarquilla les yeux, incrédule, avant de se résoudre à prêter un sens métaphorique aux paroles de Poliakov.
mardi 21 août 2012
vendredi 17 août 2012
Grégoire Delacourt - La liste de mes envies
Jocelyne Guerbette est une mercière d'Arras, une femme plutôt heureuse de son sort. Bien sûr, sa vie a connu des hauts et des bas mais maintenant que ses enfants sont grands, elle se consacre à sa mercerie, à son blog et à son mari, un peu rustre mais attentionné. Alors le jour où ses copines l'incitent à tenter sa chance au loto, elle ne s'attend pas du tout à empocher le gros lot. Dix-huit millions d'euros qui risquent bien de chambouler radicalement son existence. Mais en a-t-elle vraiment envie ?
En commençant ce roman, le style m'a fait un peu tiquer. Jocelyne est une femme un peu trop épatante pour être vraisemblable, elle m'a fait penser à la concierge de L'élégance du hérisson. Mais je me suis tout de même laissée séduire par le style. Au diable la vraisemblance : ces phrases au rythme harmonieux m'ont conquise et se lisent remarquablement bien. C'est comme une mélodie qui vous emporte. On s'attache donc à Jocelyne, on marche dans ses pas, on partage ses chagrins et ses petits bonheurs. C'est la fiction qui nous entraîne et on n'a rien envie de lui demander de plus. Jusqu'au moment où tout bascule. C'est amené très habilement et par petites touches alors je n'en dirai pas plus ici. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que ce roman m'a secouée et que je ne m'attendais pas à ça. J'ai aimé me prendre cette grande claque. J'ai aimé les références à Belle du Seigneur, les réflexions pleines de bon sens (qui m'avaient paru d'abord un peu faciles mais en fait, le regard que Jocelyne porte sur la vie m'a beaucoup touchée) sont ressorties comme empreintes de sagesse. Un roman percutant, réussi, qui m'a fait passé un moment de lecture plein de frissons.
Nue, si belle devant le miroir, il me semble qu’il suffirait juste de battre des bras pour que je m’envole, légère, gracieuse. Que mon corps rejoigne ceux des livres d’art qui traînaient dans la maison de mon enfance. Il serait alors aussi beau qu’eux ; définitivement.
Mais je n’ose jamais.
Le bruit de Jo, en bas, me surprend toujours. Un accroc dans la soie de mon rêve. Je me rhabille à la va-vite. L’ombre couvre la clarté de ma peau. Je sais la beauté rare sous mes habits. Mais Jo ne la voit jamais.
Une fois, il m’a dit que j’étais belle. Il y a plus de vingt ans et j’avais un peu plus de vingt ans. J’étais joliment vêtue, une robe bleue, une ceinture dorée, un faux air de Dior ; il voulait coucher avec moi. Son compliment eut raison de mes jolis vêtements.
Vous voyez, on se ment toujours.
Parce que l’amour ne résisterait pas à la vérité.
En commençant ce roman, le style m'a fait un peu tiquer. Jocelyne est une femme un peu trop épatante pour être vraisemblable, elle m'a fait penser à la concierge de L'élégance du hérisson. Mais je me suis tout de même laissée séduire par le style. Au diable la vraisemblance : ces phrases au rythme harmonieux m'ont conquise et se lisent remarquablement bien. C'est comme une mélodie qui vous emporte. On s'attache donc à Jocelyne, on marche dans ses pas, on partage ses chagrins et ses petits bonheurs. C'est la fiction qui nous entraîne et on n'a rien envie de lui demander de plus. Jusqu'au moment où tout bascule. C'est amené très habilement et par petites touches alors je n'en dirai pas plus ici. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que ce roman m'a secouée et que je ne m'attendais pas à ça. J'ai aimé me prendre cette grande claque. J'ai aimé les références à Belle du Seigneur, les réflexions pleines de bon sens (qui m'avaient paru d'abord un peu faciles mais en fait, le regard que Jocelyne porte sur la vie m'a beaucoup touchée) sont ressorties comme empreintes de sagesse. Un roman percutant, réussi, qui m'a fait passé un moment de lecture plein de frissons.
Nue, si belle devant le miroir, il me semble qu’il suffirait juste de battre des bras pour que je m’envole, légère, gracieuse. Que mon corps rejoigne ceux des livres d’art qui traînaient dans la maison de mon enfance. Il serait alors aussi beau qu’eux ; définitivement.
Mais je n’ose jamais.
Le bruit de Jo, en bas, me surprend toujours. Un accroc dans la soie de mon rêve. Je me rhabille à la va-vite. L’ombre couvre la clarté de ma peau. Je sais la beauté rare sous mes habits. Mais Jo ne la voit jamais.
Une fois, il m’a dit que j’étais belle. Il y a plus de vingt ans et j’avais un peu plus de vingt ans. J’étais joliment vêtue, une robe bleue, une ceinture dorée, un faux air de Dior ; il voulait coucher avec moi. Son compliment eut raison de mes jolis vêtements.
Vous voyez, on se ment toujours.
Parce que l’amour ne résisterait pas à la vérité.
jeudi 16 août 2012
Francis Scott Fitzgerald - Gatsby le magnifique
Le narrateur Nick Carraway emménage à côté de la maison de Jay Gatsby. Cet homme fort riche et qui organise de somptueuses réceptions semble pourtant bien mystérieux. Dans l'Amérique des années 1920, la décadence des mœurs bat son plein et l'atmosphère délétère qui règne à cette époque est parfaitement mise en mots par Francis Scott Fitzgerald.
Si le résumé est bien court, c'est parce que le pitch de départ est plutôt simple. L'existence du héros éponyme est vue au travers du regard de son voisin, Nick Carraway. L'auteur prend son temps pour installer le cadre de son récit et j'avoue avoir trouvé cela un peu longuet par moments. On découvre progressivement l'histoire de Gatsby et on réalise finalement que c'est un livre empreint de cruauté et de nostalgie. Du coup, j'ai préféré la seconde partie du livre à la première. Je regrette cependant que les sentiments des personnages aient été traités de manière trop allusive. Quelque chose a manqué pour me faire entrer pleinement dans l'histoire, ce qui ne m'a pas empêché d'apprécier le style très agréable du roman. J'ai été davantage touchée par la fin, dommage que cela ait eu lieu un peu trop tardivement. A noter qu'une nouvelle adaptation du roman sortira début 2013, signée Baz Luhrmann, l'un de mes réalisateurs favoris ; je ne la manquerai donc sous aucun prétexte (d'autant qu'on retrouve Leonardo Di Caprio et Carey Mulligan au casting, que de bonnes surprises en perspective, je croise les doigts).
Il eut un sourire de compréhension où il y avait bien plus que de la compréhension. C'était un de ces sourires rares qui ont le don de vous rassurer à jamais, et qu'il arrive que l'on rencontre quatre ou cinq fois dans une vie. Il se portait - ou semblait se porter - un instant sur le monde extérieur tout entier, puis se concentrait sur vous, sur vous seul, avec un irrésistible préjugé en votre faveur. Il vous comprenait dans la mesure exacte où vous vouliez être compris, croyait en vous comme vous auriez aimé croire en vous-même, et vous assurait qu'il avait exactement de vous le sentiment que vous souhaitiez, au meilleur de vous-même, donner à autrui.
Si le résumé est bien court, c'est parce que le pitch de départ est plutôt simple. L'existence du héros éponyme est vue au travers du regard de son voisin, Nick Carraway. L'auteur prend son temps pour installer le cadre de son récit et j'avoue avoir trouvé cela un peu longuet par moments. On découvre progressivement l'histoire de Gatsby et on réalise finalement que c'est un livre empreint de cruauté et de nostalgie. Du coup, j'ai préféré la seconde partie du livre à la première. Je regrette cependant que les sentiments des personnages aient été traités de manière trop allusive. Quelque chose a manqué pour me faire entrer pleinement dans l'histoire, ce qui ne m'a pas empêché d'apprécier le style très agréable du roman. J'ai été davantage touchée par la fin, dommage que cela ait eu lieu un peu trop tardivement. A noter qu'une nouvelle adaptation du roman sortira début 2013, signée Baz Luhrmann, l'un de mes réalisateurs favoris ; je ne la manquerai donc sous aucun prétexte (d'autant qu'on retrouve Leonardo Di Caprio et Carey Mulligan au casting, que de bonnes surprises en perspective, je croise les doigts).
Il eut un sourire de compréhension où il y avait bien plus que de la compréhension. C'était un de ces sourires rares qui ont le don de vous rassurer à jamais, et qu'il arrive que l'on rencontre quatre ou cinq fois dans une vie. Il se portait - ou semblait se porter - un instant sur le monde extérieur tout entier, puis se concentrait sur vous, sur vous seul, avec un irrésistible préjugé en votre faveur. Il vous comprenait dans la mesure exacte où vous vouliez être compris, croyait en vous comme vous auriez aimé croire en vous-même, et vous assurait qu'il avait exactement de vous le sentiment que vous souhaitiez, au meilleur de vous-même, donner à autrui.
mercredi 15 août 2012
Cornelia Funke - Mort d'Encre
Après Cœur d'Encre et Sang d'Encre, la fin des aventures des héros du monde d'Encre ne s'annonce pas de tout repos. Farid a fait venir Orphée dans le Monde d'Encre afin qu'il écrive les mots qui ramèneront à la vie Doigt de Poussière maintenant que Fenoglio n'écrit plus. Le Geai Bleu est menacé par Tête de Vipère puisque le livre qu'il lui a relié et qui est censé le rendre immortel est en train de moisir, le corps de son propriétaire est donc lui aussi en état de putréfaction. Les menaces qui pèsent sur Mo rejaillissent sur le peuple et les brigands ont fort à faire pour protéger les enfants d'Ombra.
J'avoue qu'en commençant le troisième tome de la trilogie de Cornelia Funke, je commençais un peu à me lasser (c'est long, tout de même, 2100 pages ; en tout, j'aurai passé un bon mois dessus). Néanmoins, j'ai été séduite par la fin de cette longue aventure. L'auteure a trouvé un dénouement magistral à son œuvre ; elle a su faire de ses personnages de papier des êtres suffisamment complexes pour qu'ils continuent de nous surprendre, elle a su donner un nouveau souffle aux mots, renouveler l'intérêt de ses lecteurs au fil des pages. Et ce qui m'a le plus séduite (même si c'était déjà le cas dans les tomes précédents), c'est la façon dont la réalité et la fiction s'enchevêtrent. Car c'est finalement une jolie mise en abyme sur le pouvoir des mots et des histoires que nous propose Cornelia Funke. Une histoire sombre comme celles de Fenoglio, dans laquelle le Bien a fort affaire pour l'emporter sur la noirceur des méchants. Orphée est une figure remarquablement inquiétante, tout comme Mortola et même Tête de Vipère ; mais heureusement qu'ils ont des adversaires à leur mesure tels que Violante, Doigt de Poussière ou le Geai Bleu.
L'enfant le regarda. Puis elle remonta la manche de Mo jusqu'à ce que la cicatrice apparaisse. La cicatrice dont parlaient mes chansons... Elle écarquilla les yeux, le contempla avec ce mélange de respect et de crainte qu'il avait décelé dans tant de regards. Le Geai Bleu. La fillette repartit en courant vers sa mère et Mo se redressa. Chaque fois que sa poitrine lui faisait mal à l'endroit où Mortola l'avait blessé, il avait la sensation que le brigand auquel Fenoglio avait prêté sa voix et son visage s'était introduit en lui. Ou avait-il toujours été une part de lui-même, qui avait dormi jusqu'à ce que le monde de Fenoglio la réveille ?
J'avoue qu'en commençant le troisième tome de la trilogie de Cornelia Funke, je commençais un peu à me lasser (c'est long, tout de même, 2100 pages ; en tout, j'aurai passé un bon mois dessus). Néanmoins, j'ai été séduite par la fin de cette longue aventure. L'auteure a trouvé un dénouement magistral à son œuvre ; elle a su faire de ses personnages de papier des êtres suffisamment complexes pour qu'ils continuent de nous surprendre, elle a su donner un nouveau souffle aux mots, renouveler l'intérêt de ses lecteurs au fil des pages. Et ce qui m'a le plus séduite (même si c'était déjà le cas dans les tomes précédents), c'est la façon dont la réalité et la fiction s'enchevêtrent. Car c'est finalement une jolie mise en abyme sur le pouvoir des mots et des histoires que nous propose Cornelia Funke. Une histoire sombre comme celles de Fenoglio, dans laquelle le Bien a fort affaire pour l'emporter sur la noirceur des méchants. Orphée est une figure remarquablement inquiétante, tout comme Mortola et même Tête de Vipère ; mais heureusement qu'ils ont des adversaires à leur mesure tels que Violante, Doigt de Poussière ou le Geai Bleu.
L'enfant le regarda. Puis elle remonta la manche de Mo jusqu'à ce que la cicatrice apparaisse. La cicatrice dont parlaient mes chansons... Elle écarquilla les yeux, le contempla avec ce mélange de respect et de crainte qu'il avait décelé dans tant de regards. Le Geai Bleu. La fillette repartit en courant vers sa mère et Mo se redressa. Chaque fois que sa poitrine lui faisait mal à l'endroit où Mortola l'avait blessé, il avait la sensation que le brigand auquel Fenoglio avait prêté sa voix et son visage s'était introduit en lui. Ou avait-il toujours été une part de lui-même, qui avait dormi jusqu'à ce que le monde de Fenoglio la réveille ?
mardi 14 août 2012
Justine Lévy - Mauvaise fille
Après mon coup de cœur pour Rien de grave, le second livre de Justine Lévy ne m'aura pas longtemps résisté. Il s'agit une fois encore d'une autobiographie maquillée en roman mais qui est consacrée cette fois essentiellement au personnage de sa mère. Justine Lévy (enfin Louise, l'héroïne du livre) tombe enceinte alors que sa mère, déjà atteinte d'un cancer, est sur le point de mourir. Dans cet entre-deux étrange où elle s'apprête à devenir mère alors qu'elle est en train de perdre la sienne, elle revient sur la figure maternelle et sur tout ce qu'elle a présenté de failles : de la mauvaise mère à la mauvaise fille, elle se sent à son tour envahie par l'angoisse de devenir une mauvaise mère.
Pour Justine Lévy, l'écriture est une thérapie. C'est un peu comme si, à chaque fois que sa vie basculait, pour réussir à avancer, elle devait la mettre en mots. Chacun de ses livres est donc comme un cap de franchi, une victoire remportée sur les démons qui la guettent. Mais en passant par l'écriture, elle se réinvente à chaque fois. La Louise de papier n'est pas le reflet fidèle de l'auteure, mais déformé par la fiction, par la musique des phrases. C'est finalement cela qui est le plus intéressant. On ne lit pas Justine Lévy par voyeurisme (enfin pas moi en tout cas), mais pour voir comment elle se débat dans cet enchevêtrement de mots, comment elle métamorphose ses angoisses en phrases bien écrites et qui sonnent juste. Même si j'ai un peu moins aimé ce roman que le précédent, j'ai été touchée par ce portrait écorché et plein de tendresse qu'elle fait de sa mère ainsi que par les interrogations qui la hantent à propos de sa fille à naître. Et toujours, en toile de fond, la figure solaire et rassurante de Pablo (elle en a eu de la chance de le rencontrer, celui-là !). En tout cas, encore un beau livre avec des phrases qui vous font chavirer le cœur et qui vous invitent à réfléchir encore longtemps après l'avoir fini.
"Maman est morte, je suis maman. Voilà, c'est simple, c'est aussi simple que ça, c'est notre histoire à toutes les trois. Tu en mets du temps à raconter les histoires, je me disais quand elle me racontait une histoire dans mon lit. Là c'est allé vite, si vite, le regard de maman dans le regard de ma fille, c'est là qu'elle est, c'est là que je la retrouve, et dans ses gestes aussi, dans les gestes impatients, un peu brusques, de ma petite fille doublement aimée. Maman vit en Angèle qui court sur une pelouse interdite. Maman me parle et me sourit quand Angèle lance son regard de défi aux adultes qui la rattrapent et la grondent. Maman est là quand Angèle tombe et se relève aussitôt, les dents serrées, pour ne pas pleurer. Elle est dans le cri qu'elle ne pousse pas, dans sa petite grimace d'enfant crâne qui ne compose pas. Partout, dans mon enfant, ma mère a laissé son empreinte."
Pour Justine Lévy, l'écriture est une thérapie. C'est un peu comme si, à chaque fois que sa vie basculait, pour réussir à avancer, elle devait la mettre en mots. Chacun de ses livres est donc comme un cap de franchi, une victoire remportée sur les démons qui la guettent. Mais en passant par l'écriture, elle se réinvente à chaque fois. La Louise de papier n'est pas le reflet fidèle de l'auteure, mais déformé par la fiction, par la musique des phrases. C'est finalement cela qui est le plus intéressant. On ne lit pas Justine Lévy par voyeurisme (enfin pas moi en tout cas), mais pour voir comment elle se débat dans cet enchevêtrement de mots, comment elle métamorphose ses angoisses en phrases bien écrites et qui sonnent juste. Même si j'ai un peu moins aimé ce roman que le précédent, j'ai été touchée par ce portrait écorché et plein de tendresse qu'elle fait de sa mère ainsi que par les interrogations qui la hantent à propos de sa fille à naître. Et toujours, en toile de fond, la figure solaire et rassurante de Pablo (elle en a eu de la chance de le rencontrer, celui-là !). En tout cas, encore un beau livre avec des phrases qui vous font chavirer le cœur et qui vous invitent à réfléchir encore longtemps après l'avoir fini.
"Maman est morte, je suis maman. Voilà, c'est simple, c'est aussi simple que ça, c'est notre histoire à toutes les trois. Tu en mets du temps à raconter les histoires, je me disais quand elle me racontait une histoire dans mon lit. Là c'est allé vite, si vite, le regard de maman dans le regard de ma fille, c'est là qu'elle est, c'est là que je la retrouve, et dans ses gestes aussi, dans les gestes impatients, un peu brusques, de ma petite fille doublement aimée. Maman vit en Angèle qui court sur une pelouse interdite. Maman me parle et me sourit quand Angèle lance son regard de défi aux adultes qui la rattrapent et la grondent. Maman est là quand Angèle tombe et se relève aussitôt, les dents serrées, pour ne pas pleurer. Elle est dans le cri qu'elle ne pousse pas, dans sa petite grimace d'enfant crâne qui ne compose pas. Partout, dans mon enfant, ma mère a laissé son empreinte."
dimanche 12 août 2012
Gone away
Pieds nus j'avance dans la poussière
Du chemin qui doucement m'éloigne
De nos souvenirs. Je suis la mer
Ou j'imagine qu'elle m'accompagne
Les claquements brûlants du ressac
Retentiss(ent) encore comme un fouet
Sans me retourner, mon cœur à sac
Ressasse le mal et puis se tait
Jamais je ne comprendrai comment
On se remet de tant de douleur
Les vagues s'en viennent doucement
Et s'en vont quand sèchent mes pleurs
Ces notes-là résonnent encore
Est-ce toi qui me les as soufflées
Embrasée l'amertume dévore
Les braises que tu as ravivées
11.06.2012
Du chemin qui doucement m'éloigne
De nos souvenirs. Je suis la mer
Ou j'imagine qu'elle m'accompagne
Les claquements brûlants du ressac
Retentiss(ent) encore comme un fouet
Sans me retourner, mon cœur à sac
Ressasse le mal et puis se tait
Jamais je ne comprendrai comment
On se remet de tant de douleur
Les vagues s'en viennent doucement
Et s'en vont quand sèchent mes pleurs
Ces notes-là résonnent encore
Est-ce toi qui me les as soufflées
Embrasée l'amertume dévore
Les braises que tu as ravivées
11.06.2012
samedi 11 août 2012
Justine Lévy - Rien de grave
Justine Lévy est la fille de l'illustre BHL, l'ex-femme du sexy philosophe Raphaël Enthoven, qui la quitta pour Carla Bruni, notre ex-première dame qui était elle-même alors la maîtresse de Jean-Paul Enthoven (le père de Raphaël, si vous suivez toujours). Cet imbroglio digne des Feux de l'amour permit à Justine Lévy de trouver cette formule cinglante et tout à fait adaptée qualifiant Raphaël d’"Hippolyte du pauvre". Au-delà de la dimension sordide et un peu trop people de ce largage, Justine Lévy signe un roman autobiographique percutant à l'écriture fluide et délicate.
Interviewée par Thierry Ardisson, visiblement mal à l'aise face à ses questions indiscrètes, Justine Lévy rappelle que son livre est d'abord un roman, et que certains éléments en sont fantasmés. Il n'empêche que le matériau premier en est avant tout sa propre existence. Pour ma part, j'ai été totalement séduite par son écriture. Elle a le sens de la formule et ne manque pas d'humour. Comme elle le précise dans l'interview, elle a commencé à écrire une fois qu'elle a commencé à aller mieux, et cela se ressent (je pense d'ailleurs que c'est la condition sine qua non pour être capable de retranscrire une telle expérience sous forme de roman). Ce qui est vraiment intéressant, c'est qu'elle n'adopte pas un ton aigri ; au contraire, elle fait preuve de subtilité dans sa façon de présenter les choses. Et si elle n'est pas toujours tendre avec Paula-Terminator (alias Carla Bruni) ou Adrien (son ex-mari, Raphaël), elle ne se présente pas non plus sous un jour particulièrement avantageux. Jeune fille souffrant d'un manque pathologique de confiance en soi, Louise (l'héroïne) trouve dans l'amour-fusion un mode d'épanouissement qui est pour elle l'incarnation du bonheur. "On n'avait pas vingt ans, on s'aimait mais on ne savait pas ce que cela
voulait dire, on ne savait pas que ça voulait dire qu'on allait
souffrir, qu'on allait pleurer et se battre et se faire du mal et avoir
envie de mourir, on avait vu les autres mais on n'était pas les autres,
on était un miracle, on allait gagner là où Ariane et Solal avaient
échoué, on vivait dans l'instant, on ne se posait pas de questions, on
ne savait pas qu'un jour l'amour deviendrait un souvenir qui tord le
coeur. "... voilà comment elle présente le couple Adrien-Louise au début de son livre. Mais ce tableau sans nuages présente lui aussi des fêlures : un avortement à vingt ans qui la plonge dans un abîme de doute la fera sombrer dans les amphétamines. Sans concession, elle dresse d'elle un portrait au vitriol, allant jusqu'à pointer du doigt que son mal vient peut-être justement de l'homme qu'elle aime. Mais le livre n'aborde pas seulement le chagrin d'amour ; il propose une introspection qui revient sur l'enfance, le rapport aux parents et à la grand-mère. Une vie toute chamboulée par le départ de sa mère à quatre ans, le sentiment de ne pas être assez armée pour cette existence, mais tout cela est écrit avec beaucoup de talent, sans chercher à donner une explication à tout. Les événements, tels qu'ils ont eu lieu ou romancés, invitent le lecteur à la réflexion. Malgré le drame, sans cesse frôlé, il faut pourtant continuer à vivre. Même si on revient de loin, le mot d'ordre est : "Rien de grave". Nécessité de relativiser les choses pour déjouer la peur du vide, et finir par combler ce dernier avec des mots qui pansent les blessures. J'ai beaucoup aimé la justesse du ton, la lumière de ce récit que les zones d'ombres mettent justement en valeur, par moments c'est une véritable révélation. Certaines phrases de ce roman m'habiteront longtemps.
Oui, peut-être que c'est mieux
comme ça, dans le fond. Peut-être qu'il fallait qu'on se quitte pour
devenir adultes. Peut-être que c'était le seul moyen de grandir avant de
vieillir, de ne pas devenir, un jour, des vieux bébés gâtés. Peut-être
qu'il le fallait pour savoir un jour ce qu'aimer veut vraiment dire.
Aimer ça ne veut pas dire se ressembler. Aimer ça ne veut pas dire être
pareils, se conduire comme deux jumeaux, croire qu'on est inséparables.
Aimer c'est ne pas avoir peur de se quitter ou de cesser de s'aimer.
Aimer c'est accepter de tomber, tout seul, et de se relever, tout seul,
je ne savais pas ce que c'est qu'aimer, j'ai l'impression de le savoir
aujourd'hui un peu plus.
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